CE, avis., 4 février 2022, n° 457135

Intérêt : fonction publique ; agent public contractuel ; contrat à durée indéterminée et déterminée

Le Conseil d’Etat vient de rendre un avis intéressant la question de savoir si la méconnaissance par l’employeur public du délai de préavis de licenciement d’un agent public à contrat à durée déterminée ou indéterminée entraîne l’annulation de cette décision.

Cette question se posait en raison de la nouvelle rédaction de l’article 40 du décret du 15 février 1988 pris pour l’application de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction issue du décret du 29 décembre 2015.

Pour rappel, selon cet article, l’agent recruté pour une durée indéterminée ainsi que l’agent qui, engagé par contrat à durée déterminée, est licencié avant le terme de son contrat, a droit à un préavis qui est de :

  • huit jours pour l’agent qui justifie auprès de l’autorité qui l’a recruté d’une ancienneté de services inférieure à six mois de services ;
  • un mois pour l’agent qui justifie auprès de l’autorité qui l’a recruté d’une ancienneté de services égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans ;
  • deux mois pour l’agent qui justifie auprès de l’autorité qui l’a recruté d’une ancienneté de services égale ou supérieure à deux ans.

En l’état antérieur du droit, le manquement au préavis de licenciement rendait le licenciement de l’agent public illégal en tant qu’il avait pris effet à une date prématurée (CE, 28 mars 1990, Commune de Saint-Laurent-du-Var c/ Clément, n° 91738).

S’agissant du licenciement d’un agent public, qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée, la méconnaissance par l’administration du  préavis de licenciement entraîne l’illégalité du licenciement, son annulation totale et l’obligation de réintégrer l’agent (CE, 14 mai 2007, Caussade, n° 273244).

Cette position vient d’évoluer en faveur de l’administration ; dans son avis, le Conseil d’Etat estime ainsi :

  • Qu’il résulte de ces dispositions que l’agent non titulaire de la fonction publique territoriale recruté pour une durée indéterminée ou pour une durée déterminée ne peut être légalement licencié avant le terme de son contrat par l’autorité territoriale compétente qu’après un préavis, sauf si le licenciement est prononcé pour des motifs disciplinaires ou au cours ou à l’expiration d’une période d’essai.
  • Que la circonstance que le préavis auquel l’agent non titulaire avait droit n’a pas été respecté par la décision de licenciement n’est pas de nature à entraîner l’annulation totale de cette décision, mais la rend seulement illégale en tant qu’elle prend effet avant l’expiration du délai de préavis applicable.
  • Qu’en outre, l’agent non titulaire ayant été illégalement privé du bénéfice de tout ou partie du préavis a droit à une indemnité correspondant au préjudice résultant de cette privation, dont il revient au juge administratif, saisi de conclusions à cette fin, de fixer le montant.

Ce dernier point s’inscrit dans le prolongement de la jurisprudence : l’agent public irrégulièrement évincé du service a droit à la réparation intégrale du préjudice qu’il a subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre, y compris au titre de la perte des rémunérations auxquelles il aurait pu prétendre s’il était resté en fonctions (CE, sect., 6 décembre 2013, Commune d’Ajaccio, n° 365155 ; CE, 6 avril 1998, Ducroux, n° 154466).

Conseil pratique : en cas de méconnaissance du licenciement, il pourrait donc être demandé l’annulation de la décision de licenciement et l’indemnisation des préjudices qui en résulte.