CE, 2 février 2024, Société Suez Eau France, n° 489820
Mots-clés : concession ; secret des affaires ; concurrence
Par cet arrêt le Conseil d’Etat a précisé que le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu d’exclure de la procédure de passation une société qui a obtenu des informations confidentielles susceptibles de lui donner un avantage indu en raison d’un dysfonctionnement informatique majeur de la plateforme de dématérialisation dès lors qu’il en a informé le pouvoir adjudicateur.
En effet, le principe est que « lorsque l’autorité concédante identifie des éléments précis et circonstanciés indiquant que l’opérateur a effectué des démarches qu’il savait déloyales en vue d’obtenir des informations dont il connaissait le caractère confidentiel et qui étaient susceptibles de lui procurer un avantage indu dans le cadre de la procédure de passation », elle peut exclure de la procédure de passation l’opérateur en cause, indique le Conseil d’État (art. L. 3123-8 du CCP). Cependant, le juge a estimé qu’en informant le pouvoir adjudicateur, avant la poursuite de la négociation, de la connaissance des informations confidentielles mises à disposition contre son gré, même après plusieurs jours, l’entreprise candidate « devait être regardée comme ayant nécessairement renoncé à tirer parti de ces éléments dans le cadre de la procédure ».
Cet arrêt est également l’occasion pour la Haute juridiction de confirmer sa jurisprudence Société Transdev qui admet qu’une personne publique puisse déroger aux règles qu’elle a fixées dans le règlement de la consultation « dans les circonstances très particulières de l’espèce et en l’absence de manœuvre » (CE, 8 novembre 2017, Société Transdev, n° 412859).
Dans le cas très particulier ayant donné lieu à la jurisprudence société Transdev, le pouvoir adjudicateur avait, par erreur, transmis à un candidat l’offre d’un autre candidat, faussant ainsi les conditions de la concurrence. Le Conseil d’Etat avait précisé que dans ces conditions le pouvoir adjudicateur pouvait choisir le délégataire sur la base des offres intermédiaires en fonction des nombreux échanges auxquels avaient donné lieu les négociations, sans que les candidats aient pu proposer une offre finale bien que ce soit contraire au règlement de la consultation.